Publications Hogan Lovells | 24 juin 2020
La logistique : au cœur de nouveaux challenges énergétiques et environnementaux – Piqûre de rappel réglementaire
La crise sanitaire a mis en lumière le rôle stratégique de la filière logistique qui a permis d’assurer un approvisionnement de tout à chacun en produits divers – dans un contexte de confinement notamment marqué par une réorientation massive (et probablement durable selon certaines études) des consommateurs vers le e-commerce. A la différence de certains actifs immobiliers tels que l'hôtellerie ou le commerce qui ont été durement impactés par la pandémie de COVID-19, la logistique s'est révélée, à l’occasion de la crise sanitaire, un actif solide et résilient.
Aussi les médias se sont fait l’écho d’un intérêt grandissant des investisseurs pour la logistique, mais pas pour n’importe quelle logistique: pour une logistique plus verte, plus respectueuse de l’environnement et performante au plan énergétique.Sur le plan réglementaire, les textes intervenus en matière environnementale et énergétique se multiplient. Il sera fait ici une piqûre de rappel synthétique des textes les plus récents susceptibles d’intéresser la filière.
ENERGIE : La loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 – Vers davantage de centrales solaires et de verdure sur les toits des entrepôtsCette loi relative à l'énergie et au climat impose d’intégrer sur certaines constructions (sous réserve que celles-ci créent plus de 1000 m² d'emprise au sol) :
- un « procédé de production d’énergies renouvelables » ou
- un « système de végétalisation basé sur un mode cultural garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité » ou
- « tout autre dispositif aboutissant au même résultat »
(Cf., art. L. 111-18-1 du Code de l’Urbanisme).
Quelles sont les constructions concernées ?
Il s’agit des nouvelles constructions d’entrepôts, mais également des nouvelles constructions de locaux à usage industriel ou artisanal, de hangars non ouverts au public faisant l'objet d'une exploitation commerciale et des nouveaux parcs de stationnements couverts accessibles au public. On entend par « nouvelles constructions » celles pour lesquelles les demandes d’autorisation d’urbanisme sont déposées après le 9 novembre 2019.
Est-il possible de déroger à ces obligations ?
Des dérogations sont prévues notamment lorsque l'installation des dispositifs concernés induit une difficulté technique insurmontable ou qui ne peut être levée dans des conditions économiquement acceptables.
Il existe également des dérogations spécifiques pour les constructions accueillant des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) (Cf. arrêté ministériel en date du 5 février 2020). En substance, si le bâtiment abrite certaines catégories d'ICPE listées dans l'arrêté ministériel précité (telles que, par exemple, le traitement de surface), alors les obligations précitées ne s'appliqueront tout simplement pas au bâtiment qui les abrite.
ENERGIE : Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 / Arrêté ministériel du 10 avril 2020 – Vers une réduction de la consommation bâtimentaire en energie
La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique prévoit la mise en œuvre d’actions de réduction de la consommation d'énergie finale dans les bâtiments hébergeant des activités tertiaires d’au moins 40% d'ici 2030, 50% d'ici 2040 et 60% d'ici 2050, par rapport à une consommation énergétique de référence qui ne peut être antérieure à 2010 (Cf., article R. 131-38 du Code de la Construction et de l’Habitation).
Le décret d'application susvisé précise en particulier le type d’actions susceptible d’être mis en œuvre pour atteindre ces objectifs : Il s’agit d’actions devant porter :
- sur la performance énergétique des bâtiments ;
- sur l’installation d’équipements performants et de dispositifs de contrôle et de gestion active de ces équipements ;
- sur les modalités d’exploitation des équipements ;
- sur l’adaptation des locaux à un usage économe en énergie et le comportement des occupants.
A priori, il semblerait que les entrepôts ne sont pas concernés par le décret d’application susvisé car ils ne sont pas explicitement visés par ses termes.
Le décret d’application s’applique à :
- tout bâtiment ou partie de bâtiment existant au 24 novembre 2018 hébergeant exclusivement des « activités tertiaires » (santé, éducation, services, commerces, etc.) sur une surface de plancher supérieure ou égale à 1.000 m², exception faite de certains bâtiments limitativement énumérés (bâtiments à usage de culte, de défense nationale, de sécurité civile ou de sûreté ou ceux bénéficiant d'un permis de construire précaire) ;
- toutes parties d'un bâtiment à usage mixte qui hébergent des activités tertiaires sur une surface de plancher cumulée supérieure ou égale à 1 000 m2 ;
- tout ensemble de bâtiments situés sur une même unité foncière ou sur un même site dès lors que ces bâtiments hébergent des activités tertiaires sur une surface de plancher cumulée supérieure ou égale à 1 000 m2.
Il est vrai que la nature des locaux d’entrepôt ou des activités qui y sont exercées fait déjà l’objet de requalification. On pense notamment à la position de l’administration fiscale qui retient parfois la qualification de locaux industriels, en matière de taxe foncière, en prenant en compte l’importance de l’appareillage (de convoyage par exemple) dans lesdits locaux.
S’agissant des deux derniers cas, ils peuvent (sous les réserves des exigences de surface évoquées ci-dessus) concerner le cas d’entrepôts intégrant - en leur sein ou dans un bâtiment séparé - des bureaux ou d'autres activités.
Est-il possible de déroger aux objectifs précités ?
Il est possible d’opérer (pour reprendre les termes du décret) une « modulation » des objectifs précités dans certaines conditions, notamment en cas de coûts manifestement disproportionnés des actions nécessaires par rapport aux avantages attendus.
Ces conditions sont plus amplement décrites dans l’arrêté ministériel du 10 avril 2020 paru au Journal Officiel du 3 mai 2020.
Ce dernier décrit également en détail les méthodes de calcul pour déterminer la performance énergétique de référence du bâtiment concerné ainsi que son niveau de consommation d’énergie finale.
ENVIRONNEMENT : Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 – Vers une multiplication des actions liées à l'économie circulaire
Cette loi relative à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire contient de très nombreuses dispositions visant notamment à prévenir la production de déchets, à mieux informer le consommateur sur les produits générateurs de déchets ou bien encore à favoriser la lutte contre le gaspillage.
Des décrets d’application, doivent encore intervenir pour préciser les modalités d’application de ces dispositions.
Il n’est pas possible d’évoquer toutes ces dispositions en détail ici, mais il faut savoir que nombre d’entre elles sont susceptibles d’intéresser les logisticiens. En particulier, on relèvera que :
- s’agissant des produits en plastique à usage unique :
La loi interdit la mise à disposition (et donc la vente) de certains produits en plastique à usage unique à compter du 1er janvier 2020 (cas des gobelets et verres ainsi que des assiettes jetables de cuisine pour la table notamment) ou du 1er janvier 2021 (cas des pailles à l'exception de celles destinées à être utilisées à des fins médicales, confettis en plastique, piques à steak entre autres).
- s’agissant des équipements électriques et électroniques (EEE) :
La loi prescrit (comme cela était le cas jusqu’en 2019) que toute personne qui fabrique, importe ou introduit sur le marché national à titre professionnel des EEE ménagers ainsi que les acheteurs successifs de ces équipements fassent apparaître, jusqu'à l'utilisateur final, sur les factures de vente de tout nouvel EEE ménager, en sus du prix unitaire du produit, le coût unitaire supporté pour la gestion des déchets collectés séparément issus des EEE ménagers.
- s’agissant des produits non alimentaires neufs :
La loi impose que les producteurs, importateurs et distributeurs de produits non alimentaires neufs destinés à la vente soient tenus de réemployer (notamment par le don des produits de première nécessité à des associations de lutte contre la précarité), de réutiliser ou de recycler leurs invendus, sous peine d’amende administrative dont le montant ne peut excéder 3000 euros pour une personne physique et 15000 euros pour une personne morale, la décision pouvant par ailleurs être publiée aux frais de la personne sanctionnée.
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